Dès le mercredi 26 novembre
pour la première de la dernière pièce de Hadjadj, spectacle patronné par la
fondation Lejeune, j’étais présent chez les maristes à Lyon (au théâtre de la Solitude).
Je suis membre du « fan-club »
de Fabrice Hadjadj, même si les rencontres furtives que j’ai eues avec lui (à
la suite de deux autres de ses pièces) ne lui auront pas laissé un souvenir
inoubliable…
Voici la présentation officielle
:
La
Compagnie De Bas en Haut
présente Jeanne et les
Post-Humains ou le sexe de l'ange, une pièce de Fabrice Hadjadj,
mise en scène de Véronique Ebel avec Luca Boschetti, Véronique Ebel et
Siffreine Michel.
L’an 87
de la Démocratie Mondiale. Les démo-citoyens se sentent enfin parvenus à la
société la meilleure (en tout cas la moins pire) grâce à la Playbox IV, au
Compost Universel et au Laveur de Mémoire Bêta+... Partout l’on chante la «
Dignité et la Liberté de la Personne », et c’est pourquoi les enfants ne sont
plus générés selon l’obscur truchement des sexes ni élevés au sein d’étroites
familles incompétentes, mais conçus sans défaut, dans des utérus artificiels,
avec la collaboration de firmes qui leur assurent libéralement des études et
une situation.
Cette «
Grande Paix », cependant – qui aurait pu le prévoir ? – est soudain troublée
par une jeune fille : Joan 304, caissière chez Ark-Market. Un ange lui parle,
la guide en une étrange mission. Il lui demande de se préserver de la
contraception universelle puis de coucher – sans réticence – avec Valentin 608,
garçon qui travaille avec elle à l’hypermarché. Et la voici enceinte. Enceinte
de manière sauvage, incontrôlée, déformante, comme on ne l’est plus depuis près
d’un siècle.
Cette
pièce est l’histoire de son procès... Bienvenue
au paradis des post-humains !
Cette pièce, comme l’avoue l’auteur
(dans la préface du texte) s’inscrit finalement
dans un cycle (finalement, car ce n’était
pas forcément son intention originale), une trilogie dont les autres opus sont le massacre des Innocents, et Pasiphaé… Ce cycle pose la question du
mystère de la maternité. Le cadre est bien différent des opus précédents :
biblique dans le premier cas, mythologique dans le deuxième, futuriste dans ce
cas. Je dis futuriste, car comme le constate Hadjadj (toujours dans sa
préface), la science présentée n’est presque pas fictionnelle. Dans tous les
cas, c’est bien notre présent qui est interrogé.
Et la pièce alors…
C’est bien du Hadjadj, qui cherche à
nous déranger, qui cherche à nous provoquer, qui cherche à nous gêner… Les
rires qui ont émaillé le spectacle témoignaient bien souvent de la gêne éprouvée
par le spectateur.
On pourrait parfois se demander, si
(comme je l’avais déjà ressenti dans Pasiphaé) il n’y a pas un peu de
complaisance de sa part à employer du vocabulaire cru, voire vulgaire : Cela
peut déranger. Mais je pense qu’il use de ce truc en réaction à une culture
contemporaine qui n’appelle jamais un chat un chat, et qui grâce à cela fait
passer le pire (que pensez-vous de la « sédation profonde » quand
elle cherche non pas le soulagement de la souffrance, mais le terme de la vie…). Évidemment,
cela choque.
L’auteur présente un monde
futuriste, proche du meilleur des mondes qui semblera complètement impossible à beaucoup. Et pourtant…
si ce que nous présente Hadjadj à travers sa lucarne n’est effectivement pas
très attirante, d’autres auteurs ont déjà écrit des œuvres valorisant ces types
de civilisations… [je vous propose de lire Vendredi
de R. A. Heinlein – étant bien entendu que ce livre ne dit pas tout de la pensée d’Heinlein... j'aime beaucoup Heinlein].
L’idée de faire un parallèle avec le
procès de Jeanne d’Arc (il y a des moments on se croirait dans Jeanne et les juges de Thierry Maulnier)
est extrêmement intéressante. Ce n’est pas un décalque
de "l'épopée de Jeanne d’Arc", mais bien plus un éloge de la faiblesse, de la Jeanne du procès, abandonnée par ses voix... et l'ange la quitta.
Enfin, la mise en scène de Véronique
Ebel est minimaliste, à l’image de ce qu’elle avait fait pour Pasiphaé, ou qu’Hadjadj avait fait pour le massacre. Cette mise en scène
servie par d’excellents acteurs (que l'on commence à connaitre : Véronique Ebel et Siffreine Michel ont joué dans les pièces précédentes) est très efficace…
Il n’y a dans toute la pièce
qu’un seul contact physique entre les personnages : le monde de la
Démocratie Mondiale va-t-il exploser suite à cela ?
En conclusion, si à mon avis, ce n’est
pas la meilleur pièce du théâtre d’Hadjadj, j’ai apprécié le spectacle et l’objectif
visé est atteint en ce qui me concerne : cela donne à penser. Toutefois, un bémol : je n'ai pas compris le sous-titre (ou le sexe de l'ange) : quelqu'un peut-il m'aider ?
pour commander sa place.
https://www.weezevent.com/jeanne-et-les-post-humains