« Je n'abandonne pas la croix, mais je reste d'une façon
nouvelle près du Seigneur Crucifié. Je n'assume plus le pouvoir de la charge du
gouvernement de l'Église, mais je demeure dans le service de la prière. Saint
Benoît dont je porte le nom comme pape, me sera un grand exemple »
L’actualité de ces derniers jours, avec la « bombe »
que nous a lâchée notre pape Benoit doit nous porter à réfléchir… car, comme
êtres humains, nous sommes normalement fait pour réfléchir et celui qui,
volontairement, ne réfléchit pas, est comme en démission de l’espèce humaine.
Une déception ?
Pour beaucoup d’entre nous, – qui gardons bien souvent une
vision bien humaine de l’Église, la considérant d’abord et avant tout comme une
institution géniale, comme une sorte de grande multinationale –, c’est initialement
un réflexe de déception[1] qui nous est venu lorsque le
pape Benoît XVI a annoncé qu’il renonçait au ministère pétrinien. La réaction
immédiate du cardinal Dziwisz, qui s’exclame spontanément :
« on ne descend pas de la croix », est symptomatique de nos réactions[2].
Une décision
Mais, lors de son annonce, notre pape avait immédiatement
précisé que ce n’était pas un coup de tête : « Après avoir examiné ma
conscience devant Dieu, à diverses reprises ». C’est devant le Seigneur
que cette décision fut prise… Et c’est lors de l’audience du 27 février[3] que le pape revient sur les
racines de cette décision.
Alors que l’âge et l’épuisement se font de plus en plus
sentir, au point que la charge devient insupportable, non pas d’un point de vue
subjectif, mais d’un point de vue objectif (la mission ne peut plus être
remplie, la charge ne peut plus être portée)[4], la question que pose Benoît
XVI au Christ est celle de Pierre : « que veux-tu de moi ? »,
celle qu’il avait déjà posé un certain 19 avril 2005. Aujourd’hui, ce n’est pas
une question théorique, ce n’est pas non plus une demande de congé, ou de
vacances, c’est l’ouverture à la mission que donne le Christ et lui-seul. À
Jean-Paul II, le Christ a demandé un témoignage bien spécifique, à Benoît XVI,
c’est un autre témoignage qui est demandé.
Un témoignage
Benoît XVI précise que lorsque l’on devient pape, il n’y a
plus de ‘vie privée’, car tout est donné, à Dieu et à l’Église (à nous donc).
En renonçant à cette charge, le pape ne reprend pas ce qu’il a donné, mais les
modalités d’exercice changent. Lui, il a foi en la puissance de la prière, il a
foi en la « communion des saints »[5]. C’est, à la suite de Saint
Benoît, dans la prière et une vie retirée, que le pape va suivre le Christ.
Il y a quelques années, mon évêque avait écrit une lettre
pastorale intitulée : « suivre Jésus de près ». C’est bien ce
programme que Benoît XVI veut suivre aujourd’hui, au service de l’Église.
Un exemple
Il y a une valeur exemplaire à l’acte de Benoît XVI, qui
réside dans l’écoute de la volonté de Dieu : n’aurait-il pas été plus
simple pour ce vieux monsieur que de rester sur le trône ? On lui aurait
prévu un emploi du temps allégé, le gouvernement effectif aurait été laissé au
cardinal-secrétaire d’état… et cela se serait bien passé. Mais non, ce n’est
pas le chemin facile qui se présente au pape, ce n’est pas le chemin facile qui
s’ouvre devant nous si nous voulons suivre le Christ.
Ainsi comme notre pape Benoît, posons-nous la vraie question : « Seigneur, que voulez-vous de moi ? », quelle est la croix qui se présente à moi et qui me permettra de vous suivre aujourd’hui ? quelle est votre volonté, pour la « louange et la gloire de votre nom, ainsi que pour mon bien et celui de toute votre Église sainte »[6] ?
[1]
Déception d’autant plus forte, que vraiment on l’aime, notre pape.
[2]
Depuis, le cardinal est passé de la réaction affective à l’acceptation
raisonnée.
[5]
Nous qui récitons le credo chaque dimanche, avons-nous réalisé que cette
communion des saints implique cette solidarité entre nous face à Dieu et donc
cette force de la prière ? cf. CEC 953
[6]
L’orate fratres, qui est traduit par « pour la gloire de Dieu et le
Salut du monde » dans les missels français.
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