- La situation théologique
Lorsque le
concile Vatican I est suspendu par le pape Pie IX, seule une toute petite
partie du chantier prévu est accomplie. Alors que le concile avait le projet de
réaliser un ensemble de texte portant sur l’ensemble de l’Église, seul la
primauté et le magistère pontifical ont été développés.
Une
circulaire de Bismarck sur les conséquences du Concile évalue que « après
le concile Vatican I les évêques n’ont plus d’importance, n’étant que de
simples représentants locaux du pape »[1].
Toutefois, les évêques allemands, soutenus explicitement par le pape,
s’opposent à cette interprétation, et rappelle la doctrine catholique : la
papauté comme l'épiscopat sont d’institution divine et ont donc une autorité
propre.
Dans
l’univers catholique, certains ont pu croire que l’ensemble de la question de
l’autorité dans l’Église avait été traité. Ainsi, la doctrine qui se répand
dans l’Église est comme déséquilibrée : l’essentiel de l’ecclésiologie se
résume à la doctrine de la primauté pontificale.
Pour beaucoup, la perception de l’Église se résume
alors à une pyramide : toute autorité vient de Dieu, elle est en plénitude
dans le pape, les évêques participent à cette autorité pontificale.
Toutefois,
la première moitié du XXe siècle voit se rouvrir un certain nombre de questions
: « le renouveau liturgique dès 1909, le mouvement œcuménique dès 1925,
la redécouverte de la Bible comme fondement de la théologie de l’Église, la
remise à jour de la mission qu’est l’Église en vertu de son apostolicité, dans
un monde à la fois plus diversifié et plus en quête d’unité : tout cela
allait confluer à Vatican II »[2].
En effet, ces questions ouvertes forçaient à se poser des questions sur la
nature même de l’Église.
Le pape
Jean XXIII, après les velléités de Pie XI en 1925 et de Pie XII en 1948,
annonce le 25 janvier 1959, clôture de la semaine pour l’unité des chrétiens,
la tenue d’un concile œcuménique, à des fins d’aggiornamento.
2. Le déroulement
du Concile
- La phase anté-préparatoire (17 mai 1959 – 30 mai 1960)
C’est
une phase de prise de conseil, sous la houlette du cardinal-secrétaire d’état Tardini,
auprès des évêques, des chefs de dicastères et des théologiens des universités
romaines. Les documents sont réunis en quinze volumes et ont une ligne de force
: il faut compléter le concile inachevé du Vatican, en prenant compte des
développements récents de l’ecclésiologie.
À
ce titre, il faudra aborder les sujets « de la nature et la
constitution de l’Église, son ministère et son magistère, ses rapports avec la
société civiles et avec les communautés chrétiennes non catholiques, sans
oublier les incidences de la doctrine mariologique sur la doctrine
ecclésiologique et vice versa »[3].
- La phase préparatoire (5 juin 1960 – 10 octobre 1962)
Onze
commissions préparatoires et trois secrétariats sont constitués. Chacune est
présidée par un cardinal qui est le préfet du dicastère correspondant aux
matières abordées. L’ensemble est coiffé par une commission centrale présidée
par le pape. Chaque commission élabore des textes qui sont soumis à la
commission centrale, puis au pape, puis adressés aux futurs Pères conciliaires.
Le concile est ouvert solennellement le 11 octobre.
Le texte « sur l’Église » est distribué aux
Pères tardivement, le 23 novembre 1962, alors que la 1ère session
est près de sa fin.
- 11 octobre - 8 décembre 1962 : Première session
La majorité
des Pères conciliaires estime que ce schéma sur l’Église doit être refondu ;
Ce schéma déçoit largement les Pères ; en effet, si le
fond est considérée comme globalement valide, l'esprit et la formulation sont
par trop académiques. Le cardinal Suenens intervient auprès du pape pour
suggérer une vraie programmation pour la deuxième session : centrer le concile
sur l’ecclésiologie, avec une double dimension ad intra et ad extra.
Le 5
décembre, le cardinal Montini, le futur Paul VI, « demande qu’avant
tout, par ce texte sur l’Église, soit glorifié Jésus-Christ : car aussi
bien dans son ministère que dans sa vie mystique, l’Église du Christ doit
manifester la pensée du Christ et reproduire son image, comme dans un miroir »[4].
- 1962-1963 : Première intersession
Une
commission est créée, et pendant l’intersession, elle établit, à partir de la
substance du premier schéma, un nouveau schéma[5],
qui prend un plan en 4 parties totalement nouveau[6] :
I - le mystère de l’Église ; II - la constitution hiérarchique et
l’épiscopat ; III - le Peuple de Dieu et les laïcs ; IV - la vocation
à la sainteté dans l’Église.
- 29 septembre - 4 décembre 1963 : Deuxième session
Les débats
sont menés par quatre modérateurs, les cardinaux Agagianian, Dopfner, Lercaro
et Suenens. Ce schéma nouveau est alors étudié par les Pères et il est
largement critiqué[7]; Entre
le 30 septembre et le 31 octobre, les Pères examinent le schéma sur l’Église,
un vote indicatif sur la collégialité épiscopale est réalisé à l’initiative des
modérateurs. À une faible majorité, l’assemblée décide d’insérer le texte
relatif à la Vierge Marie au sein de la constitution sur l’Église.
Du 5 au 15 novembre, on examine le schéma sur la
charge pastorale des évêques (Christus Dominus). La minorité conteste la
validité du vote sur la collégialité.
- 1963-1964 : Deuxième intersession
Le 6 août
1963, le pape Paul VI publie sa première encyclique, Ecclesiam suam, sur
l’Église. Un mois avant la troisième session conciliaire, Paul VI publie
l'encyclique pour présenter les voies par lesquelles l'Église doit aujourd'hui
accomplir sa mission. Cette encyclique engage l'Église sur la voie du dialogue
: « L’Église doit entrer en dialogue avec le monde dans lequel elle vit. L’Église
se fait parole ; l'Église se fait message ; l'Église se fait conversation ».
- 14 septembre - 21 novembre 1964 : Troisième session
Du 15 au 18
septembre, les Pères examinent la version définitive du schéma sur l’Église,
les six premiers chapitres sont approuvés. Le 19 novembre, on procède au vote
solennel de la Constitution sur l’Église (Lumen Gentium). (2134
voix contre 10).
3. Promulgation
Le 21
novembre le texte est promulgué officiellement par le Pape Paul VI comme constitution
dogmatique[8].
Elle compte alors 8 parties :
I - Le mystère de l’Église
II - Le
Peuple de Dieu
III - La constitution hiérarchique
de l’Église et spécialement l’épiscopat
IV - Des laïcs
V - La vocation universelle à la
sainteté dans l’Église
VI - Les religieux
VII - Le caractère eschatologique de
l’Église pérégrinante et son union avec l’Église des cieux
VIII - La bienheureuse Vierge Marie
Mère de Dieu dans le mystère du Christ et de l’Église.
[1]
G. Alberigo « le Concile
Vatican I », p. 356, in les conciles œcuménique, 1. L’histoire,
1994, Cerf, 430p.
[2]
Ch. Moeller « Le ferment
des idées dans l’élaboration de la constitution », p. 85 in l’Église de
Vatican II, Unam Sanctam 51b, 1966, 702p.
[3]
U. Betti, « histoire
chronologique de la constitution », p. 58 in l’Église de Vatican II,
Unam Sanctam 51b, 1966, 702p.
[5]
U. Betti, « histoire
chronologique de la constitution », p. 65 in l’Église de Vatican II,
Unam Sanctam 51b, 1966, 702p.
[6]
Le « projet belge »,
rédigé par Philips, sert de plan de base.
[7] Ch. Moeller « Le ferment
des idées dans l’élaboration de la constitution », p. in l’Église de
Vatican II, Unam Sanctam 51b, 1966, 702p.
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